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De l’objet au processus : essai sur les catégories de la pensée électroacoustique

Bastien Gallet

L’absence de notation qui caractérise les musiques "électroacoustiques" a eu pour conséquence le développement d’un important dispositif descriptif et conceptuel : il a fallu classer, analyser, catégoriser, trouver des mots pour dire ce qui ne peut que s’entendre. Ce n’est donc pas seulement la musique que ces pratiques ont transformé, mais aussi le discours que l’on tient sur la musique. Il ne saurait y avoir, au sens strict, de "musicologie" électroacoustique, tout au moins avec les moyens que la musicologie met en oeuvre pour analyser et comprendre les musiques qui se notent.

J’aimerais interroger, du point de vue à la fois des outils conceptuels nécessaires à la description de ces musiques et des modèles théoriques qui ont permis de les penser, le sens de cette évolution. La réduction que Pierre Schaeffer entendait réaliser, et dont il croyait emprunter le protocole à Husserl, est profondément une ouverture du sonore au conceptuel (autrement dit à des formes théoriques non musicologiques). Priver le son de sa référence, objective ou instrumentale, c’est en quelque sorte lui donner une abstraction (c’est-à-dire aussi bien une concrétude) qui le dispose au concept. Ce sont ces étranges noces que je voudrais interroger et décrire.